L'heure du départ

L'heure du départ était arrivé. L'aube se levait à peine. Un bateau attendait au port de la ville. Roy observait la mer en silence, le soleil donnait des reflets scintillant à la mer qui s'étendait devant lui. Le jeune homme ne voulait pas partir et laisser sa sœur dans le palais de leur ennemi. Il n'avait aucune confiance dans le nouvel empereur et sentait un piège silencieux mais sûr se refermer sur eux, mais surtout sur Alia. Celle-ci était venu l'accompagner pour son départ. Il se tourna vers elle et lui sourit de façon rassurante. Il ne voulait pas l'inquiéter.

- Bon, nous y voilà, il est l'heure de partir.

Anna était à côté de lui, elle non plus, visiblement, n'avait aucune envie de quitter sa sœur. Il avait fallu beaucoup insister pour qu'elle accepte, à contre-cœur de repartir au royaume de l'Air avec son frère et son père. La présence de Forciticus rassurait un peu les membres de la famille de l'Elu du Bien. Quand ce dernier s'approcha de Roy pour le saluer, le jeune homme lui donna une accolade viril pour lui souffler à l'oreille :

- Surtout veille bien sur elle, préviens-moi au moindre problème. Je te confie ma petite sœur mon ami, ce n'est pas rien.

Puis il se recula, le saisit par l'épaule et lui sourit, comme pour lui donner force et courage. Pendant ce temps, Anna s'était jetée dans les bras de sa sœur aînée et tentait de retenir les larmes qui ne pouvaient s'empêcher de rouler sur ses joues.

Tout le monde s'était levé tôt pour saluer le départ de la famille royal de l'Air. C'était à partir de cet instant que le devoir de gardien de l’Élue du Bien allait commencer. Bien qu'elle n'ait pas réellement besoin d'être protégée par quelqu'un comme Forciticus étant donné que sa puissance et ses pouvoirs étaient nettement supérieurs aux siens, mais c'était une façon pour tous ceux qui l'aimaient de se sentir un peu rassurer. Puis cela lui permettait de lui tenir compagnie. Lorsque Roy lui donna l'accolade, Forciticus sentit la crispation nerveuse de ses muscles, le prince de l'Air n'était visiblement pas rassuré du tout de laisser sa sœur au palais de Cristal. Le jeune homme tenta de le rassurer en lui souriant :

- Ne t'inquiète pas, tu seras au courant au moindre problème, mais je m'assurerai qu'il n'y en ai aucun.

Roy lui rendit son sourire, mais Forciticus pouvait lire l'inquiétude au fond. Pour ce qui était d'Anna, il était évident que cette séparation était très difficile. À elle aussi le jeune homme assura qu'il veillerai sur Alia, mais cela sembla ne rien changer du tout. La seule qui semblait garder son calme et son sourire sincère c'était l’Élue du Bien.

Le port était plein de curieux venus voir le départ de la famille royal de l'Air. Le gratin de l'aristocratie du palais du Cristal était également présent. Alia aurait vraiment préféré que ce départ se fasse en intimité, mais on ne pouvait pas quitter le palais impérial après une mission officielle sans une cérémonie officielle et sans la présence de représentants importants. Cependant au moment des aux revoirs, on laissa la famille un peu à l'écart de la foule pour permettre de se séparer tranquillement. Pendant que Roy saluait Forciticus, la princesse devina qu'il lui demandait de bien veiller sur elle. A cet instant, Anna se jeta dans ses bras. Alia vit bien qu'elle essayait vainement de contenir ses larmes, elle lui sourit avec empathie :

- Allons Anna, ne pleure pas, nous nous reverrons bientôt. Fais attention à toi ma petite sœur adorée, tu es forte, et courageuse, mais parfois tu es trop spontanée, alors essais de doser ça hein.

La jeune fille la serra dans ses bras. Si elle affichait un sourire serein, elle avait, en réalité, l'impression qu'on lui broyait le cœur. Et chaque instant de plus passé sur cet berge à voir tout les signes du départ lui faisait monter une boule dans la gorge. Mais elle avait appris depuis qu'elle vivait dans ce monde, à contrôler et cacher chacune de ses émotions. Elle restait donc droite et souriante, encourageant sa sœur. Lorsque Forciticus tenta de rassurer Roy, la jeune fille ne pu s'empêcher d'intervenir pour détendre l'atmosphère :

- Oui ne t'en fais pas, il veillera à ce qu'aucun insecte effrayant n'entre dans mes appartements, à ce que je n'attrape aucun rhume, bref je vais avoir un vrai gardien poule pire que Valencia pour veiller sur moi.

Roy s'avança vers elle. La princesse posa délicatement sa main blanche sur la joue de son frère et continua de sourire dans un air apaisant.

- Tu n'as aucune raison de t'inquiéter, il ne va rien m'arriver, je suis plus en sécurité moi ici que vous là bas.

La conversation avec l'Empereur de Télania, Darkhell Magister avait pris fin, et Mythos se questionnait encore à propos de ses dires mystérieux. En quoi étaient-il si peu différents ? Quel était cet être cher qu'ils voulaient retrouver ? Pour Mythos il était évident qu'il s'agissait de son frère, Ephraïm, mais comment le seigneur des Ténèbres en avait-il eu la connaissance ? Nul part dans Télania, un livre ne mentionnait cette relation, secret éternel du mage de Lumière. Néanmoins, avant de pouvoir en discuter d'avantage avec l'Empereur, et de trouver un nouveau moyen d'aborder ce délicat sujet, Mythos savait qu'il devait aller saluer Eros et ses enfants s'en aller à leur tour, juste après le départ de la reine du Feu.
Il descendit à nouveaux les escaliers du Palais, et marcha en direction de l'embarcadère impériale. En raison du monde fou accumulé autour, et ce malgré la présence des gardes impériaux, Mythos en déduisit qu'il arrivait juste à temps. Quelque seconde lui suffit pour s'approcher de ses amis de l'Air (et du Feu), et entendre les dernières phrases de son apprenti.

- Partez rassurer Roy, votre soeur est entre de bonnes mains

Fit-il en apparaissant, derrière l'Elue du Bien, ses deux mains posées sur ses épaules. Un large sourire, derrière sa barbe blanche reluisante, illuminait son visage, décoré de ses deux petits yeux bleus pétillants. Alors, sont égard traversa les visages, celui d'Anna, celui d'Eros, et d'autres proches de la princesse de l'Air, tous attristé, par le fait de devoir quitter leur douce protégée, amie et proche.

- Cessez donc de vous apitoyer et de verser ces larmes pour notre chère Alia, son Excellence a réouvert les portails de Télania, aller du Palais de Cristal au Royaume de l'Air sera aussi simple que de traverser une porte.

Alors, de son sceptre, il frappa le pavé, libérant une onde de choc qui fractura l'espace sur plusieurs mètres, au dessus de la rivière menant à la mer. La plaie s'agrandit et prit la forme d'un disque, entouré d'un anneau doré complété par des écritures mystiques. Epoustouflé par ce sortilège, que l'on désignera comme la création d'un portail, la foule lacha un cri d'admiration alors que Mythos, fier de pouvoir à nouveau faire ce sortilège déclara :

- Voici la porte du Royaume de l'Air, mes amis.

Et son sourire se clôtura par un clin d'oeil à Alia.

- Une vie sans magie serait bien malheureuse.

Roy se laissa faire. Sa sœur était si calme et douce, comment pouvait-elle faire ? Cachait-elle ses larmes ? Sans doute, elle était forte mais pas insensible, et bien trop attachée à sa famille pour les voir partir une durée indéterminée sans en souffrir. Le jeune homme la prit alors dans ses bras, la serrant fort contre une dernière fois avant un long moment. Elle avait beau être forte, il la voyait tout à coup si fragile et menacée.

- Je t'en prie fais bien attention à toi petite sœur. Tu vas tellement me manquer.

Le jeune homme ferma les yeux pour profiter pleinement de cette dernière étreinte. Il l'avait déjà perdue une fois, il ne voulait pas que cela recommence, et cette séparation lui donnait l'impression que c'était le cas. C'était sans doute aussi ce que ressentait leur jeune sœur, Anna.

C'est à cet instant que Mythos apparut derrière Alia et rassura Roy par ses propos. Cela réchauffa le coeur du jeune homme. Encore plus lorsqu'il vit le portail menant au royaume de l'Air. Ainsi il était d enouveau possible de se déplacer selon son bon vouloir. Un sourire sincère s'afficha sur le visage attristé du jeune homme, il se tourna vers Mythos et la main sur le cœur il s'inclina gracieusement :

- Je vous remercie seigneur Mythos, je vous confie donc, à vous aussi, ma sœur. Nous nous reverrons bientôt dans ce cas.

Il se demandait malgré tout quand est-ce qu'il allait revoir Alia lorsqu'il se souvint que c'était bientôt son anniversaire et qu'elle lui avait promis de lui donner une réponse que le faire ou non ce jour. Le jeune homme n'hésita donc pas à la rappeler à son devoir en se détachant de leur étreinte :

- Une dernière chose avant que je parte, Alia, qu'est-ce que tu as décidé pour ton anniversaire ? Tu m'avais promis une réponse aujourd'hui.

Il lui demanda cela en souriant. C'était une excuse pour se revoir plus tôt, bien qu'il souhaitait réellement fêter son anniversaire, mais ce qu'il voyait le plus dans cette fête c'était des retrouvailles avec elle. Car malgré que les portails soient de nouveau ouverts, tous seraient pris par leur devoir, et beaucoup de travail les attendait.

Alia accepta l'étreinte de son frère avec joie et le serra fort elle aussi. C'est là qu'elle eu l'impression qu'elle ne pourrait pas retenir ses larmes, mais sa volonté fut la plus forte.

- Toi aussi tu vas beaucoup me manquer. Fais attention à toi et veille sur Anna d'accord ?

Elle se détacha de lui et lui sourit. Son maître surgit derrière elle juste à cet instant, redonnant de la joie au cœur à tous. Sa franchise était amusante, il avait raison, ils ne devaient pas s’apitoyer sur cette séparation, et elle n'était pas seule. La réouverture des portails était une excellente nouvelle. Celui que créa Mythos était magnifique.

- Ainsi vous rentrez plus vite.

Déclara la jeune fille en observant l'ouverture vers son royaume. Elle n'aurait pas à voir le bateau s'éloigner au loin, le coeur lourd, comme dans les films. Un vent tiède vint soulever les cheveux blonds de l'Elue du Bien qui fixait le portail. Elle se retourna vers sa famille et leur sourit. Roy choisit cet instant pour lui rappeler qu'elle devait lui donner une réponse. Celle-ci lui vint naturellement en voyant le bateau et le portail.

- Je suis d'accord, mais n'oublis pas, je ne veux pas d'une énorme fête coûteuse.

Lui dit-elle discrètement. Il acquiesça de la tête et monta à bord du bateau avec Anna, leur père et les gens du royaume de l'Air qui rentraient avec eux. Il y avait d'autres bateaux tout le long du port pour ramener les habitants du royaume de l'Air à leur royaume. Le vent favorable, comme toujours pour son peuple, se leva et les voiles blanches des navires se gonflèrent fièrement. On remonta l'ancre et ils s’avancèrent doucement vers le portail, une fois sur lui, chaque bateau disparu dans un éclat de lumière. Bientôt sur la mer, il ne resta plus que quelques navires rangés à l'ouest. Tous ceux du royaume de l'Air avaient disparus dans le portail. C'est à cet instant qu'une unique larme vint rouler le long de la joue d'Alia qui fixait la mer vide. Elle dissimula rapidement et discrètement cette larme qu'elle voulait garder pour elle même.

"Au revoir, prenez soin de vous, je vous aime si fort..."

Voir cet immense navire équipé d'un dirigeable s'en aller et disparaître à travers le portail qu'il venait de créer, ne laissa évidemment pas indifférent Mythos, qui regarda avec peine, s'en aller ses amis, retourner dans leurs terres natales, à plusieurs centaines de kilomètres de ce grand Palais de Cristal. Le vieil homme, la tempe appuyée sur son bâton, légèrement penchée, au dessus de ses deux mains agrippées à celui-ci, tenta de repousser ses émotions fragiles en tournant son regard sur Alia en lâchant avec humour et un sourire :

- Pas une fête couteuse ? As tu oublié que tu étais une princesse, que du coup l'argent va y être grandement déboursé et les invités mondains, bref, encore l'une de ces fêtes où le gratin va se précipiter et où moi je ne viendrai pas.

C'est juste avant de dire cela qu'il sentit la tristesse envahit sa jeune amie et c'est pour cela qu'il chercha à détendre l'atmosphère. Pourtant, le meilleur moyen de penser à autre chose, c'était de faire autre chose. Alors, il tourna des talons s'appuyant sur son bâton, en ne prêtant pas attention à la foule qui ne s'était toujours pas retirée. Sentant qu'il n'était pas encore suivit, Mythos se tourna à nouveau, vers Alia, en lui tendant le bras.

- Ne restez pas là plantée comme un piquet Dame Daimon, ce n'est pas comme ça que vous pourrez aider vos amis.

Et il se remit en route, en diretion du Palais, se doutant que son apprentie la suivrait afin de discuter, de la suite des événements, de ce qu'allait faire Alia, même si le maître blanc savait déjà qu'elles étaient ses intentions.

Alors qu'Alia continuait de fixer la mer, elle fut sortie de ses rêveries par son maître au sujet de la fête de son anniversaire. Elle se tourna vers lui en souriant :

- Ne vous inquiétez pas, il suffira de ne pas trop ébruiter l'affaire. Je dois dire que cet anniversaire tombe vraiment mal.

Malgré ces paroles, la jeune fille savait que osn maître avait raison. Elle espérait pourtant qu'elle pourrait vraiment faire son anniversaire discrètement avec juste un gâteau quelques bougies, sa famille ses amis. Elle serait affreusement gênée si une grande somme d'argent devait être dépensée pour son simple anniversaire alors que des gens n'avaient pas de logis et à peine de quoi subsister. Le monde de l'aristocratie la désespérait vraiment. Elle savait que si Darkhell ne poussait pas les nobles et les riches de ce monde, aucun ne daignerait débourser la moindre pièce pour aider tous ceux qui en avaient besoin. Le premier problème sur lequel elle allait se pencher en rentrant au palais serait de calculer et répartir son argent d'ailleurs.
De nouveau plongée dans ses réflexions, la princesse ne remarqua pas que son maître s'était détourné pour partir, c'est à son interpellation qu'Alia régit et commença à le suivre. La foule de curieux était toujours présente.

"Mais qu'est-ce qu'ils attendent ?"

Sans doute voulait-ils rester jusqu'à ce que toutes les personnalités présentes sur le port soient parties. Dans ce cas les premiers à le quitter serait Alia et Mythos. La jeune fille suivit donc son maître jusqu'à leurs monture (car il n'était pas digne de leur rang de traverser la ville à pied sans escorte, ce que la princesse de l'Air trouvait parfaitement ridicule, elle qui avait passé la majorité de sa vie à aller à l'école à pied ou en transports en commun) Hierry affichait sa joie de voir s'approcher sa maîtresse. Ils se rendirent donc au palais. Une fois arrivés, ils confièrent leurs montures aux palefreniers du palais. Une fois entrés, Alia se décida d'entamer le sujet avec son maître :

- Il serait temps que j'aille informer Darkhell de ma décision.

Sur son cheval, à cru, Mythos chevauchait tranquillement jusqu'au Palais, sur les pavés de la ville, sans prêter attention à la foule qui les regardait passer. L'émulsion populaire c'était calmée, et il était devenu plus simple pour les personnalités de Télania de circuler plus facilement. Mythos n'était d'ailleurs pas de ceux qui aimaient être au centre de l'attention. Il s'était juré de rester le plus longtemps possible à l'abris des regards, n'agissant que pour être utile, afin de ramener ce monde dans la prospérité et terminer l'entrainement de sa chère apprentie. C'était une noble tache qu'il avait commencé depuis presqu'un an. Il savait aussi qu'elle toucherait un jour à son but et qu'il lui faudra se retirer du monde Mortel. Néanmoins, il y avait encore un bout de chemin à parcourir.
Arrivé devant les marches du fastueux édifice, Les deux êtres de Lumière mirent pieds à terre et s'y engouffrèrent. Evidemment, ils ne passèrent pas inaperçus, mais leur prestance était telle que personne n'osa les approcher, peur d'être indécent. C'est à ce moment qu'Alia choisit d'ouvrir une conversation dont le sujet, où plutôt la délibération était extrêmement attendue, à savoir, si elle sera ou non membre du Triumvirat. A ses mots, Mythos ne la regarda pas, marchand, d'un pas lent mais certain, vers les escaliers.

- Le seigneur Magister n'est pas dans la salle du trône, son bureau est au dessus. Il est inutile de vous dire que vous devrez l'affronter seul

A la troisième marche, le mage blanc s'arrêta et se tourna vers l'Elue du Bien pour la mettre en garde :

- N'oubliez pas que même en temps de paix, le seigneur des Ténèbres continuera de se battre.

Il reprit l'ascension en accélérant le pas.

- S'il ne peut plus utiliser ses sortilèges, ses mots n'en restent pas moins des armes maléfiques. Même attaché, un ennemi demeure toujours aussi puissant, surtout lorsqu'il s'appelle Darkhell Magister.

Il s'arrête à nouveau pour la regarder en continuant :

- Ne le méprisez, n'ayez pas même confiance en ce que vos pensées pourront vous dire ; et surtout ne le fixez jamais trop longtemps dans les yeux. Il saurez y lire des choses dont vous même n'en soupçonnez pas l'existence.

Puis il se remit à monter pour arriver au premier pallier, tourna sur l'escalier à droite et continua à avancer pour reprendre d'autres escaliers de marbres.

Alia suivait son maître et ses allures variables tout en l'écoutant.

- Je sais bien que je devrai le voir seule mais je n'ai pas peur de lui, tout ira bien.

Pour ce qui était du fait que Darkhell continuerait de s abattre bien que ce soit officiellement la paix, Alia en avait parfaitement conscience. Elle n'accordait aucune réelle confiance dans le maître des Ténèbres, même si elle voulait vraiment cette paix et peu importe qui serait au pouvoir. Elle inclina donc la tête en signe d'approbation mais sans prononcer le moindre mot. Elle n'avait pas réellement envie de se retrouver de nouveau face à l'Empereur des Ténèbres mais il le fallait bien. Elle écouta donc tous les conseils de son maître avec attention, même si elle pensait déjà comment savoir s'y prendre, il était toujours bon d'écouter les recommandations de son maître, d'autant que le mage de Lumière avait beaucoup plus d'année, de sagesse et de connaissances qu'elle.

- Je ferai très attention et suivrai vos conseils maître. Je dois vous avouer que cet entretien en tête à tête avec l'Empereur ne me réjouie pas d'avance, mais il faut bien passer par là. J'espère ne pas faire le moindre pas de travers. Pour ce qui est de le mépriser, n'ayez aucune crainte la dessus, j'ai beaucoup de respect et même de l'admiration pour cet homme, je sais que c'est étrange après tout il a été mon ennemi et il m'a tué par le passé mais je ne sais pas, il y a quelque chose en lui, je ne peux pas l'expliquer, mais quelque chose me pousse à ne pas le haïr ou le mépriser. Et puis quelque part il vous ressemble un peu, je veux dire si on oublie le côté maléfique et mégalomane.

La jeune fille avait l'impression que ce palais était immense et que les marches et les couloirs n'en finissaient jamais. Heureusement que son maître savait où il allait car elle, elle se serait sans doute déjà perdue, elle en était sûre. De plus, elle continuait à trouver que ce palais manquait cruellement de lumière. Cependant sur le passage des deux êtres de lumière, la salle s'éclairait car un léger scintillement blanc émanait des deux êtres. Alia, qui cherchait un peu de soutien finit par demander :

- M’accompagnez-vous jusqu'au bureau de son Excellence, maître ?

Forciticus avait suivit aussi vite qu'il l'avait pu Alia et son maître. Il devait veiller sur elle après tout, ce qui voulait dire, rester presque tout le temps avec elle. Bien sûr il savait qu'elle était en sécurité avec le mage de Lumière, Mythos, mais le jeune homme prenait tout de même son rôle très à coeur. Il se tint cependant à une distance raisonnable des deux Elus tout en continuant à les suivre. Il ne voulait pas les gêner dans leur conversation qui avait l'air importante. Tout ce qu'il comprit c'était que la princesse allait se rendre dans le bureau de l'Empereur.
Ils montaient des marches et traversaient des couloirs au point que Forciticus se demandait s'ils avaient une destination. De plus, Mythos ne cessait d'accélérer et de ralentir. Mais le jeune homme ne dit pas un mot et se contenta de suivre, se faisant aussi discret que possible.

Le Palais de Cristal bien qu'habité par le seigneur des Ténèbres, n'avait rien de maléfique, bien au contraire, disons plutôt qu'il incarnait l'équilibre fragile entre tous les Eléments, le Noir et le Blanc, la vie et la mort, comme un lieu de passage entre tous les oppositions de ce monde. Au travers des couloirs, on ne pouvait que voir combien le décors était imposant. Mythos, ne cessait d'un emprunter des différents, d'un pas peu rapide, afin de ne pas éveiller l'interrogation des nobles ou des domestiques que lui et Alia pouvait croiser. La discrétion était le maître mot de cette traversée. Néanmoins, alors qu'ils allaient pour prendre à nouveau des escaliers, Mythos s'arrêta, surpris, de la remarque de son amie :

- Il me ressemble ?

Cela faisait la deuxième fois dans la même journée qu'on lui disait cela. C'était si surprenant que le vieil homme pensa à une farce. Mais ce n'est était pas une. Bien au contraire. Un petite sourire amusée vin se dessiner sur ses lèvres.

- C'est amusant.

A ce moment il se remit en route, et traversèrent le premier étage de la bibliothèque, où l'on pouvait voir ce qu'il se passait au rez-de-chaussé, comme par exemple ce gnome assis sur une pile de livre qu'on portait, en discutant avec une jeune fille. Mythos, n'y jeta qu'un simple regard, non pas à cause de l'originalité de la scène et du comportement de cet étrange personnage qui semblait déranger certains des bibliothécaires, mais pour la personne qu'il représentait.
En sortant de la bibliothèque, Mythos, qui par respect pour les livres et la sagesse qu'ils représentaient, avait semblé devenir muet, reprit la parole avec douceur et humour :

- Chère amie, si je suis en train de marcher avec vous, en parlant du seigneur Magister, où croyez-vous donc que je vous emmène ?

Il lui sourit, ses yeux bleus pétillants de malice, quand soudainement, il lui posa une main sur son épaule et se téléporta juste avec elle. Lorsqu'ils réapparurent sur l'un des toits du Palais, là où le vent soufflait, faisant voler les blonds cheveux de la jeune fille et les pans de la longue robe blanche du vieil homme. Face à sa surprise d'Alia, ce dernier s'expliqua :

- Ne vous en fait pas pour Forciticus, j'espérais le semer dans les différents couloirs du Palais mais j'ai échoué semblerait-il. Non pas que je ne l'apprécie guère, bien au contraire, mais dans ces lieux, le seul maître est le seigneur des Ténèbres. Ses espions sont partout et sa magie encore plus. J'ai peur qu'il puisse s'insinuer dans l'esprit du seigneur Forciticus pour tenter d'en apprendre d'avantage sur vous, nous et nos intentions. Il me faudra trouver un moyen de l'en empêcher. Si Darkhell est capable de lire dans les pensées de ceux qui le craignent, il peut aussi tenter de prendre le contrôle d'un ne nos amis pour tenter de nous éliminer. Je ne pense pas le seigneur Forciticus suffisamment faible pour qu'il puisse le posséder, mais il se pourrait que ses oreilles deviennent celle de nos ennemis et je n'ai aucune envie que le seigneur des Ténèbres ait ouïe de ce que je vais vous dire.

Protégé par une terrasse de toit, Alia et Mythos ne pouvait pas tomber de là où il étaient. Néanmoins, la vue sur Palais de Cristal et au loin la surface des Commerçants, était sublime. On y voyait au loin la mer, l'Enya, la rivière qui serpentait, et les montagnes de Cristal.

La jeune fille suivait son maître avec légèreté et rapidité, ce qui n'était pas difficile pour quelque de son peuple et de sa race. De plus elle avait l'habitude des pas rapides de Mythos.
Alia sourit, amusée lorsque son maître s'arrêta surpris par son propos sur sa ressemblance avec Darkhell. Cependant la jeune fille ignorait que le seigneur des Ténèbres avait fait la même réflexion au mage blanc quelques heures auparavant. Elle espérait ne pas l'avoir vexé mais fut rassurée lorsqu'il sourit en disant que c'était amusant.
Lorsqu'ils traversèrent la bibliothèque, Alia marqua une pause, apercevant le jeune druide en dessous avec un étrange gnome. Elle afficha un air surpris, quel curieux personnage ! Pourtant Leïla semblait l'écouter avec attention et respect comme un professeur.

- Tiens, Leïla, que fait-elle avec cet étrange gnome ?

Elle n'eu pas de réponse. Son maîtres restait silencieux au milieu des vieux manuscrits. La princesse se dépêcha donc de le rattraper car il n'avait pas ralenti sa marche bien qu'elle se soit arrêtée. Il ne répondit à la question de l'accompagner que lorsqu'ils furent sortis et Alia afficha un sourire gênée :

- Ah oui c'est évident, pardonnez-moi maître mais vous faites souvent des choses mystérieuses alors je pensais que vous alliez me laisser au coin de couloir pour vaquer à vos affaires dont vous seul avait le secret.

C'est à cet instant que le mage de lumière décida de la téléporter ailleurs, sans Forciticus. Comme elle ne s'y attendait pas et qu'elle ne s'était pas téléportée depuis un moment la jeune fille sentie la tête lui tourner pendant quelques secondes après leur atterrissage. Ils étaient sur le toit du palais et la vue était magnifique, mais l’Élue du Bien se doutait que ce n'était pas le bureau de l'Empereur alors elle regarda son maître avec étonnement. Il s'expliqua donc suite à ce regard.

- C'est vrai qu'il prend son travail de garde du corps très à cœur, un peu trop je dois dire. Je pensait lui idre de m'attendre devant la porte du bureau de Darkhell, qu'il n'entre aps avec moi, mais nous avons du nous séparer plus tôt en fin de compte. Enfin, le pauvre, j'espère qu'il ne va pas trop s'inquiéter... Je vais lui dire de ne pas s'inquiéter sans rien lui dire de plus.

Alia lui transmis par télépathie de ne pas s'inquiéter, qu'elle était avec son maître et qu'ils étaient trop pressés mais qu'elle le retrouverait plus tard. Elle espéra qu'il ne lui en voudrait pas trop.

- Je ne pense pas non plus qu'il puisse être possédé, il n'en a pas l'air mais il est quand même fort. Et puis quelque part sa douleur c'est ce qui lui permet de garder le contrôle sur son esprit, c'est triste à dire mais c'est la vérité... Les émotions fortes nous permettent de rester nous même, en revanche il est vrai qu'il peut devenir les oreilles inconscientes de nos ennemis... Je n'avais pas pensé à ça. Mais qu'avez-vous de si important à me dire maître ?

La confiance, et l'espoir qu'Alia pouvaient dégager réchauffa le coeur du mage. Cette jeune fille, aussi jeune qu'elle soit, portait en elle toute l'humanité Télanienne, et incarnait un amour inconditionnel. L'assurance dans ses propos et ses hypothèses ne le laissèrent pas indifférent si bien qu'il lui en fit le compliment :

- Comme tu as changé Alia... J'avais pris en charge une jeune fille frêle et inquiète, maintenant je suis en présence de la seule Elue du Bien, colombe de la paix. L'amour que tu portes pour tes proches est quelque chose d'exceptionnel. Mais fait attention, il faut aussi savoir inverser les rôles : aimer ses ennemis et craindre ses amis.

Evidemment Mythos ne parlait pas pour un cas précis, mais d'une façon générale. Lui n'avait jamais réussit à aimer ses ennemis ; et c'est ce qui lui fit perdre raison dans sa vie antérieure.
Puis, afin de briser cet instant de mystère, il regarda Alia. Cette fois son regard ne laissait paraître aucune humeur, aucune sympathie, seulement un sérieux impassible, presque inquiétant.

- Quoique te dise le seigneur des Ténèbres, n'accepte jamais ses deux propositions : quitter tes pouvoirs d'Elue et réunir les Diamants, quel que soit son dessein.

Il marqua une pause avant de reprendre :

- Je ne sais pour quelle raison il désire tant le dernier Diamant qu'il n'a pas encore, celui de l'Air, peut-être est-ce vraiment pour une bonne intention, mais ce que je sais c'est que chacun des Diamants comporte une part de l'Esprit. Les réunir libère donc une puissance que ne peut contrôler un seul mortel, qui n'aura donc choix que de se laisser ronger par la folie et les conséquences de son acte. Ce n'est pas pour le bien de Télania que je te dis ça, mais pour celui de Darkhell. J'estime autant que toi cet être perfide, mais je ne pense pas qu'il soit à la hauteur de ce pouvoir.

Le temps de cligner plusieurs fois des paupières, Mythos choisit de changer de sujet en se relevant et prenant le bras d'Alia.

- L'air est un peu frai ici pour un vieil homme de mon âge. Retournons au chaud.

Et ils se téléportèrent à nouveau pour apparaître cette fois devant une immense verrière ronde, sous un dôme d'or sur lequel était peint la création de Télania. Un immense escalier les séparait d'une grande porte de bois sombre, autour de laquelle flottait deux bannières symbolisant le pouvoir impérial.

Hj : Tu répondras quand même à la question d'Alia please ? Parce que ça va me servir ^^' Merci d'avance

Alia ne put s'empêcher de sourire au compliment de son maître :

- C'est que j'ai eu un excellent professeur, et puis mourir ça fait réfléchir.

Pour ce qui était d'aimer ses ennemis elle n'avait pas trop de difficultés pour ça. Tout d'abord elle ne haïssait pas Darkhell malgré tout le mal qu'il lui avait causé, ensuite elle était carrément amoureuse du prince des Ténèbres et enfin elle appréciait Ténebris malgré son caractère d'autant plus depuis qu'elle savait qu'elle et son frère étaient amants. Bien sûr elle avait encore du mal avec Delmar et Valmer mais il fallait bien qu'elle franchisse cette étape un jour ou l'autre. Elle avait confiance. D'autant que pour tous les autres elle ne ressentait ni haine ni amour mais une simple indifférence. C'était tout de même grave de tuer des gens pour qui on ne ressentait rien... Cela mit mal à l'aise la jeune fille quand il pensa.
Enfin son maître traita du sujet secret sur lequel il voulait s'entretenir avec elle. La princesse comprenait parfaitement ce qu'elle devait faire sauf une chose :

- J'avais bien l'intention de ne lui accorder ni l'un ni l'autre, mais dois-je lui dire ouvertement que je ne renonce pas à mes pouvoir ?

Pour ce qui était du diamant, la princesse l'avait caché dans un endroit connu d'elle seule et par mesure de sécurité, elle était enchanté par un sortilège qui lui effaçait l'emplacement de la cachette de sa mémoire si l'on tentait par la force d'accéder à cette information.
Après lui avoir répondu, le maître de la jeune fille les ramena à l’intérieur. En haut d'un escalier se trouvait une porte sombre avec les symboles impériaux.

- Le bureau de "son Excellence" je suppose ?

Avant de s'être téléportés avec Alia, Mythos avait répondu à sa question, concernant ce qu'elle devait dire au Seigneur de Télania.

- Il va falloir que tu répondes seule à cette question. Darkhell reconnait bien souvent ceux qui lui mentent. Et cela risque fort de lui déplaire. Quoiqu'il en soit ne t'attend pas à ce qu'il soit satisfait de ce que t feras. Il veut que tu abandonnes ton pouvoir car seul toi peut détruire son pouvoir. Je t'en avais suffisamment parlé, mais rappelle toi de cela, un Elu est immortel tant qu'il possède son pouvoir ; seul son antagoniste peut le lui retirer.

C'est ce que disait la loi divine, l'Elu n'est pas une personne, mais un pouvoir contenu dans une personne. Il ne peut y en avoir deux, aucun, mais jamais un seul. Lorsque l'un tue l'autre, il perd ses pouvoirs.
Arrivés devant l'imposante porte, les deux personnages restèrent silencieux un certain temps, le temps qu'Alia ironise sur ce qu'elle habitait.

- En effet, son bureau, celui qui a abrité son frère, son père et tous ses ascendants. Le trône est revenu à la famille Magister. Finalement, cette guerre ne nous a ramené qu'au point de départ.

De son baton, il alla pour frapper à la porte, quand il se rappela de la question de son apprentie dans la bibliothèque, à propos de la jeune fille et du gnome sur sa pile de livre.

- J'oubliai, celui que tu as vu à la bibliothèque en présence de Leila, c'est le Gnome Argast, un druide du second cercle. Il fut un temps un apprenti de Grandil, jusqu'à ce que leurs opinions ne les séparent. Je suis surpris que Leila ait choisi de le suivre, bien qu'elle ait besoin d'un maître.

Et avant qu'Alia ne puisse rebondir sur ses propos, Mythos frappa trois coups de son sceptre sur la porte, puis se recula.

- N'oublie pas que tu as affaire avec ton Empereur, tu lui dois respect ; il est quand même l'héritier d'Origin et donc de Sinka.

La porte s'ouvrit dans un silence funeste, et lorsqu'Allia se retourna vers son maître une dernière fois, il n'était plus là.
FIN DU SUJET